Alex-Mot-à-Mots

https://alexmotamots.fr/

Alex L., lectrice compulsive, presque anonyme.
Ayant une préférence pour les bons polars, mais aimant aussi les autres genres (sauf la SF, pitié....)

Conseillé par
14 mars 2024

amour, Indochine

Je reste au Vietnam pour cette lecture, ou plutôt en Indochine, pour une défaite encore, mais celle de la France.

J’ai eu de la peine pour Alexandre, le narrateur, qui revient en France et épouse Mireille mais dont le coeur est resté à Maï Lan, la fille au visage de lune.

J’ai aimé son amitié avec Alassane Diop, son camarade de régiment avec qui il partage l’amour de la poésie.

J’ai aimé les leitmotivs : René Char dont on ne se relève pas ; le pont Paul-Doumer ou Long Biên ; « L’honneur, Alexandre, l’honneur » que répète à l’envie Alassane.

J’ai aimé que les deux indépendances (celle de l’Indochine et celle du Sénégal) soient liées. Même si l’aspect Résistance et espérance du roman m’a moins parlé.

Et bien sûr, la merveilleuse langue de l’auteur qui m’a encore une fois ravie.

Si vous ne connaissez pas encore la prose du Capitaine Alexandre, je vous enjoins à découvrir ce court roman tout en poésie, car l’auteur sait répéter et placer les virgules pour donner du rythme à la phrase. Magnifique.

L’image que je retiendrai :

Celle de la fille du taxi qui aide Alexandre à retrouver Maï Lan parce que son histoire lui plait.

Table Ronde

22,00
Conseillé par
11 mars 2024

amitié, Vietnam

En refermant ce roman, je me suis demandée où voulait en venir l’auteur. Et puis j’ai pris le récit par la fin, et tout s’éclaire.

Canaan désigne la Terre Promise, alors pourquoi commencer avec une histoire d’espionnage dans son propre camp pendant la débâcle du Vietnam ?

Le personnage principal n’est pas le narrateur, gratte papier de la CIA dans les bureaux de Saïgon, mais son recruteur Donovan.

De Donovan, nous saurons peu de choses, si ce n’est qu’il est marié au pays mais a une liaison avec la jeune Tuyen.

J’ai aimé la logeuse de Michael le narrateur, Mme Binh qui prophétise à tous ses logés la même chose : ils ne pourront oublier le Vietnam et n’auront que des filles.

Il n’y a que deux grands mouvements dans ce roman : au Vietnam et à la frontière avec le Mexique de nos jours. Mais chaque début de partie, Michael nous raconte que lorsqu’il était enfant, il souhaitait que son père badigeonne de sang les portes pour que l’ange destructeur épargne sa famille.

Cette histoire biblique, je l’ai prise comme une volonté du peuple américain de ne pas être détruit par les hordes de migrants sensées les grands-remplacés. Une façon de se prémunir contre l’inconnu qui fait peur. Seule la méthode à changer : un mur est construit. Mais le sang est toujours versé.

Vous l’aurez compris, un roman au message politique contre une Amérique qui se barricade et qui n’accueille plus en son sein, comme elle avait déjà abandonné les vietnamiens qui l’avaient aidé en d’autres temps.

Une citation :

J’étais frappé – et je le suis encore – par la quantité d’énergie qui a dû être dépensée dans ce monde fragmenté d’intérêts divergents et de luttes de pouvoir. Que nous soyons engagés dans les dernières affres d’une guerre extrêmement coûteuse en vies humaines n’y changeait rien : il n’y avait pas d’unité en termes d’objectifs politiques ou militaires, et on laissait de fortes personnalités ainsi que des centres de pouvoir continuer à imposer une lecture des événements inspirée de leur unique point de vue ou dictée par leurs intérêts particuliers. (p.87)

L’image que je retiendrai :

Celles des documents et des vêtements brûlés sur les toits de Saïgon, entrainant des nuages de neige noir.

20,00
Conseillé par
7 mars 2024

essai, Marcel Proust

Grande fan de La Recherche, je ne pouvais ignorer cet essai enfin disponible à ma BM.

Mais comme je ne suis pas noble, j’ai eu un peu de mal avec la généalogie familiale de l’auteure qui tente pourtant de la rendre la plus simple possible.

Et puis son histoire familiale n’est pas ce qui m’a le plus intéressé dans ce livre.

J’ai aimé la lecture qu’elle fait de ce roman foisonnant à travers sa pratique de l’aristocratie, comment , grâce à la lecture de La Recherche, elle a compris les fonctionnements de son milieu social de naissance mais aussi sa vacuité.

J’ai aimé qu’à travers cette lecture, elle, la féministe et homosexuelle affichée, aie trouvé le courage de s’extraire de son milieu qui souhaitait la faire taire.

Un autre effet de La Recherche : l’effet émancipateur.

J’ai aimé que l’auteure du présent essai ai eu pour déclic un épisode de Downtown Abbey dans lequel le maître d’hôtel mesure l’équidistance des couverts. Ce détail force les portes de sa mémoire, à la manière de.

J’ai aimé que la comtesse Greffuhle revienne régulièrement dans le propos.

J’ai découvert les ressassements généalogiques de la noblesse, une vision hiérarchisé et autoritaire et monolithique du monde.

Enfin, j’ai aimé que cette lecture la console de son abandon familiale, comme l’adulte Marcel console l’enfant séparé de sa mère.

J’ai aimé cette image de La Recherche comme consolation.

Quelques citations :

Toute la Recherche peut être lue comme une investigation sur l’inadéquation des mots et des choses qui implique, à terme, une démonétisation inévitable des Noms, de leur pouvoir extravagant et trompeur. (p.77)

Dans son étude, Anne Simon formule la révolution proustienne en une équation limpide : « existence + imagination = réalité » (p.186)

Tout lieu de pouvoir s’érige sur un cimetière. Descendre en droite ligne de brutes anoblies ne m’enorgueillissait pas. (p.198)

L’image que je retiendrai :

Celle du château familiale de Luynes, sur la commune de Luynes.

Conseillé par
7 mars 2024

1939-1945

Je découvre l’auteur avec cet ancien roman Prix Pulitzer.

J’ai aimé l’alternance des chapitres suivant Marie-Laure ou Werner. Bien sûr, on se doute qu’à un moment, ils vont se rencontrer. Mais les pages défilent, et toujours rien.

Si je n’ai pas compris grand chose aux travaux de Werner autour de la radio et des ondes, j’ai en revanche aimé les maquettes du père de Marie-Laure pour lui permettre de se déplacer dans le quartier, car elle est aveugle.

J’ai aimé Jutta, la soeur de Werner, qui écoute les émissions de radio étrangères et qui voit plus loin que la propagande du Reich.

J’ai aimé que la radio soit à la fois le vecteur principal de cette propagande mais aussi un appareil ennemi dans les pays conquis

J’ai aimé l’émission française qu’écoute Werner et Jutta sur les sciences.

J’ai aimé les leitmotivs : les affiches Berlin fume des Juno ! ; la voute étoilée les nuits ; les citations qui reviennent en mémoire des personnages.

J’ai aimé la passion de Marie-Laure pour les animaux marins, elle qui lit 20.000 lieues sous les mers en braille que son père lui a offert.

J’ai aimé la recherche du fabuleux diamant L’Océan des flammes, bleu-gris avec une touche de rouge au centre. Un diamant de 133 carats qui devait être enfermé pendant 100 ans.

J’ai aimé les boîtes à codes que le père de Marie-Laure construit pour ses anniversaires. Jusqu’à celle renfermant le fameux diamant.

J’ai aimé Volkheimer le colosse taiseux, ami de Werner.

Je n’ai pas aimé l’établissement scolaire de l’élite dans lequel Werner rencontre Volkheimer, et se lie d’amitié avec Frederick.

J’ai détesté ce qu’il arrive à Frederick et la culpabilité que ressent Werner qui ne fait rien pour aider son ami. Un roman qui montre, si l’on en doutait encore, que le Reich cassait aussi ses propres enfants.

J’ai aimé les pêches au sirop de Mme Manec, comme un rayon de soleil dans la bouche.

J’ai aimé ce roman sur les ondes radios qui sont devenus des ondes wi-fi. Un roman tellement riche que je ne vous ai pas parlé de tout ce qu’il s’y déroule.

Une citation :

Comment se fait-il que le cerveau, qui ne bénéficie d’aucune source lumineuse, édifie pour nous un monde plein de lumière ?

L’image que je retiendrai :

Celle des mollusques de Marie-Laure découvre dans une ancienne écurie dans les remparts de Saint-Malo que lui fait découvrir le fou du village.

Geoffroy de Lagasnerie

Flammarion

18,00
Conseillé par
7 mars 2024

justice

Dans cet essai, l'auteur démontre que Kafka ne se réduit pas à son volet absurde.
Franz K va plus loin et montre à travers ses romans et surtout La lettre au père que lors d'un acte de justice, l'homme perd la complexité de son existence pour se soumettre à la vision judiciaire de sa simplicité (p.92)
Les juges n'ont qu'une vision parcellaire de ce qu'ils jugent, dès lors l'homme peut rester, en tant qu'homme, innocent (p.84).
J'ai été étonné de la mise en lumière du système judiciaire américain : il y a le système pénal pour les Blancs et le système pénal pour les noirs. Et c'est la police qui produit le tri. (p.63).
Mais 97 pages très aérées pour cette courte démonstration. Je m'attendais à plus consistant.