La Montagne de minuit
EAN13
9782843045202
ISBN
978-2-84304-520-2
Éditeur
Zulma
Date de publication
Collection
Littérature française
Nombre de pages
176
Dimensions
12,5 x 1,2 cm
Poids
185 g
Fiches UNIMARC
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Offres

Au cœur de ce roman, un personnage hors du commun: Bastien, gardien d'un lycée jésuite et secrètement passionné par tout ce qui concerne le Tibet et le lamaïsme. Tenu à l'écart de son voisinage pour d'obscurs motifs, le vieil homme vit plus solitaire qu'un moine bouddhiste.
L'aventure commence à Lyon, par la rencontre entre le vieux sage et Rose, nouvellement emménagée avec son petit Paul. Séduite par l'étrangeté du personnage, cette dernière s'attache à lui au point de lui permettre d'accomplir le voyage de sa vie...

Vérités et mensonges, fautes et rédemption s'enlacent et se provoquent dans ce roman qui interroge avec une désinvolture calculée les «machines à déraisonner» de l'Histoire contemporaine. Roman à thèse si l'on veut, sous les bonheurs du romanesque pur, la Montagne de minuit se lit comme une exploration intrépide des savoirs et des illusions.
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Commentaires des lecteurs

Conseillé par
15 août 2010

Dès les premières pages de "La Montagne de minuit", de Jean-Marie Blas de Roblès, je n’ai pu m’empêcher de penser à "L’élégance du hérisson", de Murielle Barbery. Le personnage principal de ce livre, Bastien, est en effet un personnage effacé ...

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Pour en savoir plus sur "La montagne de minuit"

« Le romancier est l’historien du présent » rappelle Rose Sévère, chercheuse à la Maison de l’Orient, à son fils Paul qui se mêle d’écrire sur le tard un pan de la vie de sa mère sous forme de fiction. Ce roman à thèse si l’on veut, sous les bonheurs du romanesque pur, se lit comme une exploration intrépide des savoirs et des illusions. Une narration à deux voix et trois vitesses s'ordonnance avec maestria pour nous redire les passions et les tragédies inexpiables, sur fond d’équanimité. Au bout des aventures et des quêtes, à demi englouti par un « océan de sagesse », la question de la vérité reste entière. C’est Paul, le fils romancier, à qui échoit le dernier mot, ou plutôt la dernière question : « Mais je fais quoi, moi, avec tout ça ? ».

Petit lexique thématique de la Montagne de minuit

Coïncidences
« — Ça n’en reste pas moins un signe, a-t-il dit en te prenant la main, quelque chose de très important pour moi. Si vous vous intéressez un peu au Tibet, vous savez que les coïncidences n’existent pas, il n’y a que des rencontres nécessaires. »

Colline de Fourvière
« Le jour se levait sur la colline de Fourvière, détachant peu à peu les reliefs de son apparence familière : Saint-Just, sur la gauche, lointaine mais reconnaissable à ses vitraux encore éclairés de l’intérieur, puis les massifs accoudoirs de l’ancien couvent des Minimes, le contrefort des théâtres romains, juste au-dessus de l’Antiquaille, et pour finir, la basilique Notre-Dame, flanquée de sa petite tour Eiffel. On commençait à distinguer les strates diverses de toits rouges étagées sur les pentes, les bosquets de platanes ou de cyprès, les pans de murs safran, toutes choses qui palpitaient dans la clarté naissante et conservaient à cette partie de la ville son allure d’acropole surannée. Bastien ne se lassait pas de cette vision, une sorte de mirage dont la beauté culminait avec l’apparition du soleil ; par les belles journées d’hiver, comme celle qui s’annonçait, lorsque son premier rai frappait la masse byzantine de Notre-Dame, blanchissant sa muraille et détachant ses tours crénelées sur le bleu profond du ciel, il transfigurait sa lourdeur de pachyderme renversé. Les ors de la Vierge flambaient, tout au sommet de l’édifice, et malgré la présence de l’émetteur télé qui gâchait quelque peu la perspective, l’ensemble prenait une dimension orientale : pour dire les choses comme elles sont, Bastien lui trouvait alors une tournure de temple tibétain, si bien qu’il n’assistait jamais à ce moment sans que se réveillât son désir d’apercevoir un jour les terrasses du Potala. »

Foi
« — Depuis que les hommes ne croient plus en Dieu, dit-il en soupirant, ce n’est pas qu’ils ne croient plus en rien, c’est qu’ils sont prêts à croire en tout… Une remarque de Chesterton, si j’ai bonne mémoire, mais qui résume assez bien ce que je viens de vous dire. »

Jokhang
« Les voici à nouveau dehors. Bastien marche lentement vers le Jokhang en expliquant à Rose l’histoire du sanctuaire. La « Demeure du Très Précieux » date du VIIe siècle et sert d’écrin à une statue antique de Shakyamuni, le Jowo. C’est le véritable centre de Lhassa, son foyer spirituel. La légende raconte qu’une démone s’apprêtait à ravager la ville ; pour y parvenir, elle s’était coulée dans le paysage environnant jusqu’à se confondre avec lui. Une princesse découvrit en songe ce stratagème mimétique ; à son réveil, elle identifia le cœur de la démone sous la forme d’un lac aux reflets rouges. On s’empressa de le combler pour vider la créature de son sang, puis de construire le temple par-dessus. Ainsi clouée, la démone devint à jamais inoffensive.
— C’est presque une histoire de vampire, dit Rose en prenant le bras de Bastien. »

Mandala de sable
« Construire un mandala de sable était un acte d’une toute autre portée. La moindre erreur de trait ou de couleur pouvait avoir des conséquences dramatiques en termes de karma. Bastien ne s’y était résolu qu’au printemps de cette année. Son œuvre était aujourd’hui quasiment accomplie, mais il y travaillait de plus en plus lentement, mu par une sorte d’appréhension où se mêlaient l’impatience du point final et la crainte du désœuvrement qui s’ensuivrait. Les sables utilisés provenaient tous de ses promenades dans la ville ; l’ocre rouge avait été ramassé sur la place Bellecour, le jaune et le blanc au hasard des chantiers de construction, le bleu au fond d’un aquarium jeté aux encombrants. Les autres teintes ou nuances étaient issues de subtiles combi-naisons entre ces quatre couleurs de base. »

Montagne de fer
« La "Montagne de fer ", m’a-t-il expliqué sur le chemin — Chakpori, en langue tibétaine —, était surmontée autrefois par l’École de médecine, l’un des plus anciens sanctuaires de Lhassa, et des plus vénérés. J’ai vu plus tard des photos de cet endroit, prises par Schäfer en 1939. La montagne était totalement nue, avec des ondes vermiculées de blanc. Une Babel sombre et imposante autour de laquelle s’enroulait un étroit sentier. Au sommet, comme une excroissance géométrique de la montagne, le temple avait tout d’un château cathare, clos sur lui-même et sur ses secrets. Après avoir rasé l’édifice, en 59, l’armée chinoise venait de le remplacer par un relais de télévision dont la structure métallique arborait, comme par défi, la couleur vive des Bonnets jaunes. »

Nazis
« Entendez-moi bien, il ne s’agit pas de disculper les Nazis de quoi que ce soit, mais l’historiographie est suffisamment complexe pour qu’on n’y rajoute pas la manipulation. On peut, on doit accuser le nazisme de bien des crimes, mais certainement pas d’avoir eu des objectifs occultes. »

Père
« Les seules fois où il se rapprochait de nous, c’était pour sortir sa collection de monnaies antiques et vérifier que nous savions en déduire la liste complète des empereurs romains. Il fallait mettre un nom sur chacune d’entre elles, mais aussi lui donner les dates de règne, un peu comme on récite ses tables de multiplication. Domitien, 81-96 ; Néron, 54-68 ; Claude, 41-54 ; Théodose, 379-395… Un véritable calvaire ! Nous avions droit à deux erreurs ; à la troisième : "dans votre chambre, Monsieur, au lit et sans manger !" »

Potala
« C’était une chose d’admirer le Potala de loin, perché comme un modèle réduit sur sa colline, une autre de se retrouver dominé par sa masse ; au pied du palais, il fallait cambrer les reins pour distinguer un bout de ciel au-dessus des toits. Bâti dans un mélange de pierres, de bois et de mortier, le Potala superposait, loin devant, ses treize étages étalés en terrasses. Avec ses rampes d’accès latérales bordées de murets, ses façades chaulées aveuglantes, ses galeries supérieures ornées de colonnes en bois rouge, ses alignements de petites fenêtres brunes, ses toitures dorées où pointaient, comme autant de cheminées, de hauts cylindres noirs, il ressemblait, dans son allure de paquebot, à une montagne en partance.
— On dirait une super tranche d’arlequin, dit Rose, les yeux brillants. Un arlequin de chez Pignol : mousse au chocolat et sorbet de mangue sur lit de meringue… C’est à se damner ! »

Taï chi
« L’enchaînement dit "la grue blanche déploie ses ailes" le ravissait ; il goûtait l’artifice de ces différentes postures, la lenteur et la fluidité requises par leur mimétisme pour échapper au ridicule. Nu dans son petit deux-pièces, au 6 de la rue d’Auvergne, fenêtres ouvertes sur l’obscurité à peine scintillante de Fourvière, Bastien n’avait nul besoin de miroir pour éprouver l’élégance de ses déplacements. Il en savait la rectitude à l’énergie dont tout son être se chargeait au cours de leur exécution. »

Voyage
« Vers la mi-avril 1945, quelque chose pour moi comme une intronisation approchait. Seul parmi mes camarades, j’avais gagné mon voyage à Lhassa ; mon maître spirituel me préparait à cette expérience cruciale, détaillant les étapes qui me restaient à accomplir. Une fois nos dévotions faites au Jowo, nous monterions ensemble sur les terrasses du Potala ; pénétré de tout ce que j’avais appris, de tout ce que j’étais devenu, il me faudrait regarder avec lui vers la cime du Chapkori. Son enseignement serait alors terminé : j’aurais gravi la Montagne de Minuit.
Une semaine plus tard, le 24 avril, l’Armée Rouge entrait dans Berlin. »

Yack
« Tu m’as trop fait rire avec tes « yacks chevelus » ! Ça m’a rappelé les perruques en poils de yack de l’École des femmes… Essaye de voir quand même si tu ne peux pas améliorer la chose. Pour autant que je m’en souvienne, ces bêtes ressemblent plus à des mammouths qu’à des babas cool ; on devrait pouvoir sentir le suint, distinguer l’aspect filasse de la toison… À un moment donné, il faudra bien que tu franchisses le pas et que tu ailles voir tout cela par toi-même. »

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